Comment faire la bête quand on veut faire l’ange

Pour des raisons domestiques, multiples, absolument navrantes à raconter, la matinée avait mal commencé. Cela n’excuse rien, mais explique mon manque total de mise en pratique de ce qu’ici et ailleurs, je préconise en matière de vie avec nos chats : le mieux est l’ennemi du bien. Et aussi cette pensée pascalienne : l’homme n’est ni ange, ni bête, et le malheur veut que qui veut faire l’ange fait la bête. Et ajoutons, pour faire bonne mesure, un proverbe zoroastrien : dans le doute abstiens-toi !

Bref, j’ai déconné, et je m’en bouffe les doigts jusqu’aux coudes. Vous l’ignorez, mais ici la météo est vraiment calamiteuse : il fait froid, il y a un vent direct from Caucasia absolument réfrigérant, et on nous annonce une série de pluies diluviennes bonnes pour la nature, mais démoralisantes pour l’homme (et la femme), et dangereuses pour les chatons de toutes ces petites mères féroces ayant accouché dans les avoines stériles… Toute à mes ruminations noires, conséquences de cette matinée heurtée et désagréable, que vois-je, au moment de donner son assiette à la petite mère féroce devant la porte ? Des pots renversés, la petite couverture mise à intérieur de la caisse de transport trempant dehors dans l’écuelle d’eau. Bien bien bien. Action donc. Enfin réaction. Et c’est ICI que j’aurais dû me réciter ma sage litanie, et voir toutes mes alarmes allumées. Mais non, j’ai été stupide, à force de vouloir bien faire les choses.

Je dégage l’entrée, histoire de mettre une autre petite couverture dans la caisse. J’enfile les gants car la petite mère féroce est là. Et elle est TRES TRES furieuse. Elle crachotte et souffle comme au tout début, ses pupilles sont noires de fureur. Mais bon, j’ai ma tâche à accomplir.  Donc je commence à sortir les petits (magnifiques, rondouillards, en tellement bonne santé) sur un petit carton posé devant l’ouverture de la caisse. Et là, la petite mère part en vrille, attrape le chaton rose champagne et se barre en le traînant par la tête : figée d’horreur je les regarde, elle tourne partout autour, cherchant un endroit où le poser, et pour finir part tout droit dans le champ de blé au-dessus avec son petit à la gueule.

Alors là, très gros gros souci : soit elle revient chercher les deux autres, et les amène l’un après l’autre vers le petit rose. C’est la solution la plus optimiste (encore que Marinos finira bien par faucher ce champ…). Mais je connais les primipares, elles sont un peu oublieuses, et j’en ai trouvé, des petits abandonnés tout seuls, Monostou en est le vivant exemple. Sauf que Monostou était un peu plus âgé, et donc capable de gueuler assez fort pour que je l’entende. Mais ce petit rose ? Qui la petite mère féroce va-t-elle abandonner ? Le rose, et elle reviendra dans la caisse de transport seule, pour nourrir le tigré roux et le tigré brun ? Ou ces deux autres, abandonnés dans la caisse à cause de cette horrible créature bipède emmerdeuse suceuse d’entrailles et arracheuse de têtes qui traîne par là ? Et je n’ose plus aller regarder ! Quoique je fasse, je fais mal, en voulant bien faire. Et là, je suis très pessimiste : j’ai l’impression que ces chatons vont payer de leur vie mon désir de faire l’ange.

Je me foutrais des claques. Pourquoi ne pas avoir attendu qu’elle aille faire pipi ? Pourquoi avoir sorti de la caisse ces petits SOUS ses yeux ? Pourquoi avoir voulu « faire quelque chose » ? Toute mon intuition soudain silencieuse, ma raison me disant : il va pleuvoir, ces petits ont besoin d’une couche supplémentaire entre leurs corps et le plastique de la caisse (alors qu’il y a encore un carton qui est un excellent isolant), il faut mettre un plastique supplémentaire, etc. Que des conneries bien intentionnées.

Voilà donc la 1ère et dernière photo que vous verrez de ces petits dans la caisse (très mauvaise photo, mais prise à l’aveugle, le bras tendu dans la caisse, avec la petite mère féroce soufflant et crachant à mon coude)

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Toute à ma désolation, à ma colère contre moi-même, il ne me reste qu’à croiser les doigts, et espérer que cette chatte soit plus intelligente que moi.

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Un groupuscule tout noir, le gros pépère complètement couché sur la petite Paulette. Mauvaise photo, mais pestacle rigolo :

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J’adore ce champ un peu en amont de la maison, piqueté d’une variété de fleurs incroyable, et c’est un vrai enchantement des yeux depuis la route :

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Quelques plantes et fleurs pas mécontentes de cette fraîcheur et ces pluies :

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8 thoughts on “Comment faire la bête quand on veut faire l’ange

  1. PS : rongée par l’incertitude et l’inquiétude, j’ai vérifié : le nid est vide. C’est douloureux, un nid vide. Mais ouf ouf ouf, au moins elle les a regroupés. Maintenant, j’espère que c’est dans un endroit protégé de la pluie, et pas au milieu du champ de blé…

  2. Zut de zut de rezut… j’imagine que tu vas lui mettre de la bouffe pas loin du champ de blé… et si tu rapprochais la caisse du champ ? Elle reconnaîtrait peut-être son odeur…
    Mpffff… comment faire comprendre à une mère-chattounette qu’on lui veut du bien ? Tu saurais mieux faire que moi de toutes façons…
    Je croise les doigts… pour qu’une chose du destin intervienne (allez, pendant qu’on y est, une intervention divine même si je n’y crois pas pour les humains, il doit y avoir un dieu pour les chats).

    • eh bien, vois-tu, je vais mettre en pratique active et résolue, mais un peu tard, ma litanie sage : dans le doute, ne rien faire ! si elle veut bouffer, elle vient. et je crois qu’elle déteste cette caisse, sans issue pour s’échapper. il faut vraiment s’ôter de la tête que les chats raisonnent comme des humains. elle est persuadée que je lui veux du mal – quelque part, elle n’a pas tort : j’espérais qu’elle s’apprivoiserait assez pour qu’un jour je la chope pour l’amener se faire stériliser. raté ! mais oui, à part croiser les doigts et prier/engueuler artémis (qui préside à la vie des chats et des zautres zanimaux), plus grand-chose à faire. j’espère que d’ici un ou deux mois, trois petits queues-petits-bâtons (et parmi eux clomani ;-)) trouveront le chemin de la maison des chats de syros…

  3. Mais tu connais aussi le proverbe : « Qui ne tente rien n’a rien ! ». Autrement dit : « Il n’y a que ceux qui ne foutent rien qui ne risquent pas de faire de conneries ! »

    ;-)

    • justement…
      c’est une connerie que j’aurais vraiment voulu éviter, et le non-agir eût été en ce cas précis l’attitude idoine, vois-tu ?
      ;-))

  4. ce n’est pas une bêtise… vous avez pensé bien faire…Elle a emmené ses 3 chatons, et c’est tant mieux… Si madame a faim, elle reviendra, soyez en certaine… Jeter un coup d’oeil pour voir dans quelle direction elle se déplace… Et puis, vous n’êtes pas responsable… je vais être méchante, mais cela vous en fera 4 de moins à nourrir.. Méchante, non mais, il faut regarder les choses en face.. Parfois vous êtes dans la détresse…je vous embrasse mais quel est donc ce pays, où l’on pense qu’il y fait chaud, et ou il pleut sans cesse… Anne-Marie..

    • bonjour chère anne-marie ! bon, éole a bien soufflé et les gros nuages supposés nous inonder ce week-end ne passeront pas par nous, semble-t-il ! pas de pluie au programme. mais comme c’est un vent du nord, droit venu du caucase, il est singulièrement froid (17°) si on compare nos températures avec celles de la provence aujourd’hui !!
      non, ce n’est pas méchant de penser tant pis tant mieux, c’est vrai que c’est un soulagement. mais chaque chat mort aussi. le hic c’est que ces chatons qui grandiront loin d’ici n’en seront que plus difficiles à attraper pour la stérilisation, mon problème et mon objectif n°1 !!! je vous embrasse.

  5. je vois qu’il n’y a pas de bonnes nouvelles… espérons que cette maman s’en tirera ainsi que ses chatons… je vous embrasse.. Anne-Marie..

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