La parano me guette

Un petit mot, pour dire merci à toutes et tous ceux qui, ici, en mail ou sur Fesse de Bouc, ont témoigné de leur affection et leur amitié, leur indignation et leur colère aussi.

Mes conditions de vie n’ont pas changé, n’est-ce-pas ? Si j’avais du fric, je mettrais des caméras, je prendrais un avocat et j’attaquerais de toutes mes forces l’empoisonneur, quel qu’il soit. Ou même, je déménagerais, avec toutes mes bêtes, pour aller encore plus loin, plus seule – ou au moins pour changer d’horizon. Si ma vie de vieille ourse dans sa grotte était différente, plus sociale par exemple, je trouverais peut-être quelqu’un pour venir surveiller la maison. Si j’étais grecque, j’aurais moins de difficulté à aller partout, discuter, mettre des affiches, etc.

Mais. Mais la réalité est là, je suis fauchée, isolée, je ne parle pas grec. Et quelqu’un a violé mon espace de vie, a empoisonné de la nourriture ici, a tué un chat et aurait pu en tuer beaucoup d’autres. Dans un pays en plein naufrage, à tous points de vue. Et, pour la première fois de ma vie, là, c’est carrément l’insomnie de la parano. Cette histoire me ronge intérieurement, je le sens. Je me sens pleine de haine et pleine de peur.

En même temps, les petits soucis de la vie quotidienne viennent pimenter cette parano : plus de machine à laver depuis une bonne semaine, le moteur n’arrivera pas avant 10 jours, et Giroflée n’a toujours pas compris l’usage de la caisse dedans, ni n’a l’idée d’aller faire ses besoins dehors, là où elle a vécu et grandi jusqu’à présent : alors j’accumule les petits tapis sales, les couvertures souillées. Plus de sciure pour mes toilettes sèches (la scierie a fait faillite), et donc je teste les feuilles mortes. Fanis, le jardinier du Ktima Kanne à côté (là où il y a une sortie de métro), m’a dit qu’il n’était pas question qu’il utilise moins d’eau pour arroser les oliviers, que c’était une question de travail pour lui : « Mais laisse-moi au moins 2 heures d’eau par jour ! Moi j’en ai besoin pour vivre, me doucher, faire la cuisine » « Tu n’as qu’à aller à la mairie demander plus de pression » « J’y suis allée trois fois ! » « Ti na kano ? » (qu’est-ce que je peux y faire ?).

Et aujourd’hui, je vais descendre en ville, la peur au ventre, en laissant le camescope branché, planqué derrière la porte vitrée.

Il faut dire que la lecture de vos commentaires et messages correspond bien à mon état mental : je me sens vraiment très très mal, et j’ai l’impression que quelque chose a explosé dans cette vie. A certains moments, je me dis que tout va bien, qu’il faut continuer, pas se laisser enfermer dans la crainte, être positive. Et juste après j’imagine ce type venant poser sa bouffe empoisonnée, peut-être même entrant dans la maison, j’imagine un tapis de chats morts ou agonisants dans la douleur, et mon coeur et mon âme se glacent.

Auto-portrait avec Bizule (après m'être fait copieusement sucer le nez)

Auto-portrait avec Bizule (après m’être fait copieusement sucer le nez)

PS : Dans le billet précédent, j’ai oublié de dire que la seule chose de « bien » qui me soit arrivée, c’est que, comme je n’aurais rien pu faire pour sauver Bob, je n’étais pas présente au moment de son agonie.

Bob

Hier, je rentre des courses, je vois qu’il y a eu un déluge sur Chroussa. Ouvrant la porte, je vois du vomi par terre. Je pose les courses, je commence à nettoyer, et je prends un sac pour l’amener dans la réserve des chats. Et là, mon Bob est étendu dans le couloir, mort. Du mucus plein les orifices, crispé, les yeux révulsés, et un air de souffrance abominable sur sa belle gueule de beau jeune homme chat. Poison.

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Ce matin

Pour m’épargner les nerfs, j’ai commencé à fermer la porte de la grande pièce à chats, où j’entrepose les réserves, pour préparer les écuelles des repas en toute sérénité. Pour celles et ceux qui connaissent l’excitation des bêtes à ce moment-là, vous imaginez (ou peut-être non, justement) ce que cela peut devenir avec 40 ou 50 chats… Continue reading

Demain, j’aurai 60 ans

Mazette, il fut un temps où je ne pensais pas y arriver.

Et comme je vous dois à toutes et à tous ces dernières années de vie quotidienne non-ordinaire, je vais vous raconter un secret, une sorte de cadeau qui semble au premier abord empoisonné, du genre à vous plomber la journée, mais qui au deuxième abord peut se révéler « utile ». Continue reading